Les pays du bassin du Congo font feu de tout bois pour garantir la préservation dans l’accord en discussion du mécanisme REDD+ qu’ils maitrisent. Et qui a fait ses preuves depuis 2005.
La France a peut-être perdu au Front dimanche dernier lors du premier tour des régionales. Mais les pays du bassin du Congo entendent emporter la grosse bataille qui les oppose à certains pays d’Amérique latine, Bolivie en tête. L’enjeu : le maintien du mécanisme REDD+ (Réduction des émissions dues à la déforestation et la dégradation des forêts, voir encadré) dans l’accord final. L’enjeu est de taille. Pour ne pas dire vital. Sandra Freitas, experte de la Commission des forêts du bassin du Congo pour les questions de changements climatiques soutient d’ailleurs que si on n’y fait pas attention, REDD+ peut être balayé de l’accord. Ce d’autant qu’en l’état actuel des choses, ce mécanisme figure entre parenthèses dans l’article 3bis du projet d’accord. Une véritable catastrophe.
Au cours d’une rencontre entre les ministres de l’Environnement de la Comifac (Le Cameroun était représenté par deux directeurs), il a été décidé de défendre à tout prix, outre le REDD+, cinq autres points stratégiques. Il s’agit de l’objectif de long terme de limitation de la température aux aspects liés aux pertes et dommages, en passant par les mesures d’atténuation, les financements et le processus d’adaptation. Car, comme l’a souligné le ministre congolais de l’Environnement Henri Djombo, « L’Afrique centrale a des atouts à faire valoir. Il est hors de questions que l’on continue de donner la prime aux mauvais élèves, pendant que les meilleurs ne reçoivent pas grand-chose. Nos efforts doivent être reconnus et soutenus. »
Comme si ces pays avaient entendu ces déclamations, l’Allemagne, la Norvège et le Royaume Uni ont décidé mardi d’appuyer le REDD+, en reconnaissance du rôle important que jouent les forêts dans la régulation du climat. Ce sont 5 milliards de dollars, environ 2500 milliards Cfa qui vont être injectés par ces pays entre 2016 et 2020.
2°C : objectif suicidaire
Mais les pays africains ont d’autres appréhensions, qui tournent autour de l’objectif global de hausse de la température à 2°C d’ici 2050. Ceci est jugé dangereux pour le continent, ce d’autant que certains pays subissent déjà de plein fouet les perturbations liées à la hausse de la température. Au cours des négociations au niveau ministériel, qui, selon la présidence française de la conférence de collaboratives, ont permis de faire des progrès, la Comifac a vu son objectif d’une hausse de 1,5°C être adopté. Mais la résistance des pays développés est farouche. Certains pays producteurs de pétrole en Afrique sont eux-mêmes dans l’embarras. Et comme si cela ne suffisait pas, les ambitions consolidées, communiquées par les pays pour l’horizon 2100 plastronnent à 2,7°C. D’où le pessimisme de la société civile présente à la Cop21. Le journaliste Nicolas Hulot, ardent défenseur de l’environnement, avouait à l’envoyé spécial de L’Action que si un projet ambitieux, qui dépasse les considérations nationales pour se placer à l’échelle plus globale n’était pas construit, le monde courait à une véritable catastrophe. Et de se demander, comme pour se remonter le moral : « Qui peut assumer la responsabilité d’un échec des négociations de Paris ? »
Suffisant pour que le secrétaire général de l’Onu, Ban Ki Moon et le président de la Cop21, le ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius donnent de leur personne pour pousser les ministres en conclave à faire des compromis. Des rencontres formelles succèdent aux rencontres informelles. Les médias sont même mis à contribution pour tenter de débloquer des points de divergence. Dans la foulée, certains pays industrialisés ne sont pas avares de promesses, surtout en direction des pays africains. Canada, France, Allemagne, Italie, Japon, Etats-Unis, Royaume Uni, Union européenne, Suède et Hollande ont annoncé mardi mettre en place un fonds pour soutenir l’Initiative africaine pour les énergies renouvelables. Cette initiative vise à produire dès 2020 plus de 10 gigawatts d’énergie propre. Cette capacité sera portée à 300 gigawatts en 2030. Beaucoup d’autres annonces ont été faites pour l’Afrique, notamment pour soutenir la restauration de 100 millions d’hectares de terre d’ici 2030…