«Quel Cameroun voulons-nous pour nos enfants ? » Les Camerounais n’ont pas encore fini de répondre à cette question essentielle voire existentielle posée par Paul Biya en 1984.
Au gré des circonstances et des événements, individuellement ou collectivement, des tentatives de réponses sont apportées à cette question suspendue au-dessus de nos têtes comme une épée de Damoclès. Cette question vaut également interpellation ou exhortation car elle est susceptible d’agir comme une luciole ou une boussole ; un phare ou un projecteur pour apporter de la lumière à nos pulsions primaires et à nos bas instincts…
Elle mérite d’autant plus d’être posée en ce mois de septembre traditionnellement consacré à la rentrée scolaire. Au regard de la situation qui prévaut dans les établissements scolaires du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, chaque Camerounais devrait plus que jamais se poser la question : « Quel Cameroun voulons-nous [réellement] pour nos enfants » ? Non contents de prendre en otage la communauté éducative à coup de mots d’ordre, les activistes et les extrémistes ont décidé de passer à la vitesse supérieure en faisant exploser des bombes artisanales. Est-ce leur réponse au geste d’apaisement posé par le Président de la République qui a décidé de l’arrêt des poursuites contre certaines personnes interpellées et incarcérées dans le cadre des événements survenus dans ces deux régions ? En attendant les résultats des enquêtes, force et de reconnaître qu’il s’agit d’une fuite en avant et d’une grave surenchère. Quant bien même on serait tenté de minimiser cette dérive en la mettant sur le compte d’une frange de marginaux, l’acte posé ne perd pas pour autant de sa gravité et de sa dangerosité. Son impact psychologique et sa déflagration mentale soulèvent une seule question : le dialogue est-il possible avec des auteurs d’actes de guérilla ? Le mot est lâché : après les manifestations, les protestations et les revendications, certains n’hésitent pas à emprunter les voies périlleuses de la guérilla. Si tout le monde sait et voit comment cela commence, bien malin qui pourra dire ou en prédire l’issue.
Au tout début de la crise dans le Nord-Ouest et le Sud-Ouest, certains donneurs de leçons et autres moralisateurs n’avaient pas hésité à parler de génocide pour qualifier le sort réservé aux Anglophones.Naturellement, le propos était et demeure aussi excessif qu’exagéré. Il n’y a point de génocide de quelque nature que ce soit contre les Anglophones.
Par contre, et pour rester dans le même registre lexical, le vaste complot ourdi dans ces deux régions contre la scolarité des enfants n’est ni plus ni moins qu’un infanticide.
Comment désigner autrement ce crime qui consiste à dénier aux enfants le droit d’aller à l’école ? Comment qualifier autrement toutes ces menaces de mort contre les élèves et leurs parents qui osent défier les mots d’ordre ? De grâce, laissons les enfants loin des querelles des adultes. C’est valable au Nord-Ouest et Sud-Ouest. C’est valable à Yaoundé et ailleurs où certains esprits mal intentionnés font un mauvais procès au couple présidentiel d’avoir incité leurs enfants à présenter le concours de l’Enam. Quel est le délit des uns ? Quel est le crime des autres ? Rien de rien à part ces pulsions et ces instincts infanticides qui animent hélas, certains ; pulsions qui les conduisent à se tromper de cibles dans leur rage de nuire. Au nom de quel argument peut-on intenter un procès à de jeunes Camerounais, fussent-ils des enfants du couple présidentiel, qui ont choisi de se former dans leur pays ? Leur exemple n’est-il pas plutôt à louer et à saluer ? Que l’on sache, la démarche ne recèle, à ce stade, aucun relent de favoritisme, de clientélisme ou de népotisme. Par conséquent, le seul « délit de patronyme » ne suffit pas à justifier tout ce déferlement de haine et ce déchaînement de passions. Qu’auraient-ils dit si ces mêmes candidats dont personne ne conteste la nationalité ni la capacité à concourir s’étaient retrouvés admis sans passer par la case concours ? Personne n’ose l’imaginer.
En vérité, notre pays ne perd rien à lancer dare-dare une campagne de vaccination contre toutes formes d’infanticide. Une société qui détruit ses propres enfants est vouée elle-même à la destruction et à la disparition.
Christophe MIEN ZOK