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Décentralisation : Au départ était la Constitution

Le processus de décentralisation a connu un coup d’accélérateur avec la loi portant Code général des collectivités territoriales dé- centralisées.

Avec la mise en place annoncée des conseils régionaux, la décentralisation camerounaise prendra son envol. Ce sera au terme d’un long parcours qui remonte au 18 janvier 1996, date de promulgation de la Constitution en vigueur, qui, en son article 1er (al 2), fait du pays « un Etat unitaire décentralisé ». Tout un titre de la loi fondamentale est consacré à la décentralisation et l’article 55 indique les deux collectivités territoriales décentralisées retenues : les régions et la commune, tout en laissant la possibilité à la loi d’en créer de nouvelles en tant que de besoin. En application de cette disposition, le Cameroun se lance dans un vaste chantier dès juillet 2004, avec une série de lois, portant respectivement orientation de la décentralisation, règles applicables aux communes et règles applicables aux régions. Dans la foulée et en exécution de ces lois, l’Etat central commence un dégraissage progressif, avec le transfert de nombreuses compétences et ressources aux communes. En mars 2018, 63 compétences dans plusieurs domaines différents avaient été transférées à ces collectivités, avec des financements de plus de 270 milliards Fcfa. Mais le processus est jugé trop lent. Sur le terrain, les rapports se tendent entre la tutelle et les exécutifs municipaux à partir de 2008. Les élus locaux revendiquent plus d’autonomie et de moyens. Le gouvernement ne reste pas sourd à la clameur qui monte du Cameroun profond. Surtout que la demande devient de plus en plus pressante, à la faveur de la crise qui éclate dans les régions du Nord-ouest et du Sud-ouest, et qui semble exprimer le mal être d’une frange de la population camerounaise : les collectivités territoriales décentralisées(Ctd), la société civile et les populations dans leur immense majorité voulaient une plus grande implication dans la gestion des affaires locales. C’est ainsi qu’en mars 2018, il est créé tout un département ministériel en charge de la décentralisation et du développement local. En septembre 2019, le président de la République convoque le Grand Dialogue National. L’objectif est de réunir en l’espace d’une semaine, toutes les forces vives du pays, de tous les bords politiques, de la société civile, du clergé, de l’intérieur et de la diaspora, pour identifier les maux dont souffre le Cameroun et y proposer des solutions. Dans chacun des ateliers, une recommandation ressort : l’approfondissement et l’accélération de la décentralisation, à travers une tutelle plus allégée, le renforcement de l’autonomie administrative, financière et fonctionnelle des Ctd, la prise en compte de la spécificité des régions anglophones et la mise en place effective des conseils régionaux. En décembre, le Parlement est convoqué en session extraordinaire. Un seul point est inscrit à l’ordre du jour : l’examen du projet de loi portant Code général des Ctd. Ledit projet de loi qui reprend toutes les propositions du GDN, est adopté. La loi ainsi votée est promulguée. De son exploitation, il ressort que le Nord-ouest et le Sud-ouest ont leur statut spécial ; la tutelle est substantiellement allégée. Les compétences sont d’office transférées aux Ctd, et celles-ci obtiennent un régime financier propre, et 15% des ressources publiques leur sont accordées chaque année. Les élus locaux ont un statut officiel, des avantages et des prérogatives connus. En février 2020, les conseillers municipaux sont élus pour implémenter la nouvelle décentralisation. En juillet 2020, l’achèvement de la mise en place des Ctd est enclenchée avec la convocation des collèges électoraux en vue du choix des conseillers régionaux. La mise en place des régions marquera alors l’apogée de la décentralisation au Cameroun.

Longin AVOMO

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