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L'Editorial

Ça suffit !

Un maire et un enseignant ont été tués quelque part dans le Nord-ouest le jour de la fête de l’Unité, le 20 mai dernier. Une bombe a éclaté dans un débit de boissons à Bamenda quelques jours plus tard, faisant au passage de nombreux blessés. Dans certaines capitales occidentales, sous prétexte de revendiquer leur droit de vote et leur inscription sur les listes électorales, des hordes de Camerounais se réclamant d’un parti politique bien connu et de la fameuse « Brigade Anti Sardinards » (BAS) prennent d’assaut nos représentations diplomatiques. Ici au pays, le leader de ce parti joue les matamores et les va-t-en guerre et brandit des menaces en cas de non-respect du calendrier électoral. Sur tous ces sujets importants et bien d’autres, tous aussi cruciaux et vitaux les uns que les autres, de nombreux Camerounais opposent une indifférence et un silence assourdissants. Les enseignants sont muets quand l’un des leurs tombe sous les balles des séparatistes; les magistrats municipaux regardent ailleurs alors que leur collègue perd la vie, l’écharpe tricolore autour des reins. Les uns et les autres doivent se dire qu’il revient à l’Etat et aux pouvoirs publics de prendre leurs responsabilités et de trouver des solutions à ces problèmes. On les comprend.
Pourtant quand il s’agit de football, tous ces taiseux retrouvent subitement l’usage de la parole, deviennent très volubiles, rivalisent de commentaires enflammés et de propositions très inspirées. Depuis deux mois et la nomination d’un nouveau staff technique à la tête des Lions indomptables, difficile d’échapper à ce débat entre les partisans du Ministre des sports et de l’éducation physique d’une part et les adeptes du président de la Fécafoot d’autre part. Les réseaux sociaux, les plateaux de télévision, les antennes des radios sont saturés par cet unique sujet. Entre l’interprétation biaisée des textes et le recours à des arguments qui tiennent plus des arguties, de propos de cours de récréation ou de « matches de gueule » de quartiers, chacun fait feu de tout bois. Tout ce tintamarre serait pure distraction et diversion ludique si les conséquences pour l’image de l’Etat n’étaient en jeu. Entendons-nous bien: au-delà de l’aspect sportif, il y a derrière ce vaudeville, cette tragi-comédie en mondovision un véritable enjeu régalien. Au nom de quoi une association qui a reçu une délégation de service public, fût-elle celle en charge du football, sport-roi autoproclamé, peut-elle se permettre de défier aussi impunément l’autorité de l’Etat?
Certes, dès le départ, la gestion de ce dossier aurait pu se faire dans la concertation et la collaboration mais une fois que les décisions ont été prises, pourquoi continuer le bras de fer au risque de ternir un peu plus l’image, l’honneur et l’autorité de l’Etat? Pourquoi continuer à alimenter le « cafouillage dans la surface de réparation » de l’équipe nationale fanion avec le risque de marquer un but dans son propre camp? Pourquoi tous ces actes de défiance contre l’Etat qui est le principal bailleur de fonds du sport camerounais en général et du football en particulier? Pourquoi poursuivre ce combat sans tenir compte des conséquences sur les performances de l’équipe nationale? À une dizaine de jours du premier match des Lions indomptables comptant pour les éliminatoires de la prochaine coupe du monde, personne ne parle des joueurs, de tactique ou de plan de jeu. À quoi bon s’engager alors dans une compétition dans ces conditions et sous un climat et un environnement aussi délétères? Pourquoi dépenser autant d’argent qui aurait pu servir à résoudre des problèmes plus urgents et importants?
Qu’on le veuille ou non, l’affaire Minsep-Fécafoot mérite désormais, mutatis mutandis, un traitement politique en extrême urgence au même titre que le saccage de nos ambassades en Europe ou les exactions des séparatistes dans le Nord-ouest et le Sud-ouest. Le Rdpc et « son » gouvernement, auxquels on impute à tort ou à raison tous les malheurs et les déboires du Cameroun, doivent veiller à ce que soit sifflée la fin de cette triste et indigeste partie. La récréation est terminée! La chienlit, ça suffit comme ça!

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