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L'Editorial

Balle au centre!

Le Cameroun et l’Angola ont fait match nul hier soir à Luanda à l’occasion de la quatrième journée des éliminatoires de la coupe du monde 2026 zone Afrique. Le Cameroun reste en tête de son groupe. Après cette rencontre, on peut enfin espérer une trêve, une pause, un répit sur le front de la saga Minsep-Fécafoot qui tient le peuple camerounais en haleine depuis bientôt trois mois, le prochain match des Lions indomptables étant prévu en septembre. Paradoxalement, l’un des avantages de cette crise, et non des moindres, aura été de libérer les joueurs dont l’état d’esprit, les prestations et les performances sur le terrain sont plus qu’appréciables. Les résultats sont au rendez-vous et c’est le plus important. Pourvu que ça dure.

Force est également de constater que cette crise autour du football a permis de mettre en exergue le messianisme de plus en plus présent sur la scène politico-médiatique camerounaise. Comme quoi, un messianisme peut en cacher un autre. Les militants d’un certain parti politique, bien connus pour ne rater aucune occasion pouvant leur permettre de défier ou d’affaiblir l’autorité de l’Etat, se sont retrouvés en première ligne face à la Fécafoot. Ils étaient aidés dans cette croisade par une chaîne de télé dont la ligne éditoriale consiste à prendre systématiquement position contre les pouvoirs publics. Les observateurs les plus naïfs ont estimé que ce parti et son bras armé médiatique défendaient désormais le gouvernement. Illusion trompeuse! Simple alliance de circonstance.

En réalité, c’est un match d’un autre genre qui se joue sous nos yeux: le choc des messianiques doublé du match des fanatiques! Les zélotes et les sicaires des deux bords ne sont pas prêts à accepter la moindre concurrence susceptible d’affaiblir leur champion. On aurait pu les renvoyer dos-à-dos en disant: que les meilleurs ou les plus fanatiques gagnent!

Mais ce match particulier ne nous intéresse pas tant que l’intérêt général, l’image et l’autorité de l’Etat, le respect des institutions et de tous ceux et celles qui les incarnent ne sont pas remis en cause. Tel est le credo que nous défendons dans nos prises de position publiques dans ces colonnes depuis le début de cette crise.

En attendant le prochain regroupement de l’équipe nationale, il convient de remettre la balle au centre et de s’intéresser aux choses plus importantes, au moment où l’on s’achemine de manière inexorable et inéluctable vers la fin du mandat du président de la République et de celui des députés à l’Assemblée nationale, les deux institutions dépositaires de la souveraineté nationale. Alors que le football focalise et cristallise toutes les attentions, qui se souvient de la phrase-choc qui ouvrait le message de fin d’année du Président Paul Biya à la Nation le 31 décembre 2018 ? Quelques semaines après avoir prêté serment le 6 novembre, le président fraîchement réélu, auréolé de l’état de grâce et de la grâce d’état, lançait à ses compatriotes: « Le septennat qui vient de commencer devrait être décisif pour notre pays. Il pourrait même être l’un des moments les plus importants de notre histoire depuis notre indépendance. » Que signifiaient ces propos sibyllins et énigmatiques? Que voulait dire exactement Paul Biya? À quoi pensait-il? Qu’avons-nous fait pour donner de la substance à ces déclarations fortes? À quelques mois de la fin du septennat en cours, en quoi ce mandat a-t-il été différent des précédents ? En quoi le prochain sera-t-il différent alors que des voix s’élèvent de plus en plus pour demander à Paul Biya de se représenter? Telles sont les vraies questions auxquelles le football nous empêche de répondre. Il n’est peut-être pas encore tard pour y réfléchir.  

Par Christophe Mien Zok

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