Ou comment le Parti a minutieusement construit sa victoire dans cette région, pourtant à sensibilité fortement aiguë.
Le Conseil constitutionnel a proclamé, jeudi 23 mars dernier, le Rdpc vainqueur de l’élection des sénateurs du 12 mars 2023 dans la région de l’Adamaoua. Sur les 654 électeurs inscrits et les 653 qui se sont effectivement rendus dans les 11 bureaux de vote de la région, 626 suffrages ont été valablement exprimés (27 bulletins nuls). Le parti de Paul Biya s’en tire avec 337 suffrages exprimés en sa faveur, soit 53,83 %, contre 289 voix en faveur de l’Undp, représentant 46,17% des voix.
Pourtant, la partie n’était pas gagnée d’avance pour la commission régionale de campagne que pilotait El Hadj Mohamadou Abbo Ousmanou, et qui a reçu le renfort d’une équipe de la commission centrale dépêchée par le secrétaire général du Comité central, Jean Nkuété. Délégation que conduisait le ministre Grégoire Owona. Puisque dans cette circonscription, le parti de Paul Biya ne contrôle les conseillers municipaux qu’à une courte majorité (306 sur 566) et ne gère qu’une minorité des conseillers régionaux (14 sur 68). Soit un total de 320 membres du collège électoral sur 634. Si l’on ajoute à ces membres du collège électoral, le troisième segment composé des chefs traditionnels dont il était difficile de déterminer la sensibilité politique, c’est peu dire que d’affirmer que le Rdpc marchait sur une corde raide dans l’Adamaoua.
Recrutement chez l’ennemi
Ayant pris la mesure de ce danger longtemps avant même que le scrutin ne pointe à l’horizon, les élites, au premier rang desquelles le ministre Mohamadou Moustafa, ont pris le taureau par les cornes, afin d’inverser la tendance. Tous les observateurs et acteurs objectifs du landerneau politique de la région château d’eau du Cameroun, s’accordent d’ailleurs pour dire que ce dernier est le principal artisan de la victoire du Rdpc lors de l’élection des sénatrices et sénateurs du 12 mars dernier dans cette partie du septentrion.
En effet, le premier vice-président de la commission régionale de campagne, par ailleurs secrétaire général adjoint de la présidence de République, a passé deux semaines entières sur le terrain à sillonner les cinq départements (Djérem, Faro-et-Déo, Mayo-Banyo, Mbéré et Vina), et vingt-et-un arrondissements de la région, pour panser toutes les plaies internes et rallier les électeurs indécis, y compris ceux de l’opposition, à la cause du Rdpc.
Une démarche qui avait débuté de longs mois à l’avance, lorsque le ministre Moustafa sillonait la région pour rallier des électeurs à la bonne cause ; celle du Rdpc. L’on a d’ailleurs encore présent à l’esprit cette vague de démissions que ce dernier avait suscité au sein de l’Undp, notamment dans le Mayo-Banyo, le Faro-et-déo et la Vina l’année dernière.
Serge Williams FOTSO