Rien ne sert de courir; il faut partir à point. Pour avoir oublié ce dicton populaire, de nombreux prétendants à la prochaine élection présidentielle qui avaient pourtant annoncé à cor et à cri leurs candidatures n’ont même pas pu déposer leurs dossiers.
A l’instar de ces sportifs qui s’échauffent trop longtemps pour préparer la compétition, ils ont abandonné en cours de route avant le coup d’envoi. Résultat des courses: ils ne sont plus que 28 à avoir pu déposer leurs dossiers auprès de ELECAM. Le 8 août prochain, ce nombre aura encore baissé puisque selon des informations puisées à bonne source de nombreux dossiers sont incomplets.
Peu importe finalement le nombre. En attendant le verdict du conseil électoral de ELECAM et l’issue des recours qui seront introduits auprès du Conseil constitutionnel, l’attention et l’intérêt des observateurs sont focalisés sur les dynamiques et les tendances électorales qui se dessinent et se dévoilent. Ainsi, alors que l’opinion publique nationale et internationale scrutait, guettait et attendait de voir la coalition ou le candidat unique de l’opposition, elle a plutôt eu droit à un collectif de vingt partis regroupés autour de…Paul BIYA.
Dire que cette annonce en a surpris plus d’un est un euphémisme au regard de l’identité, du parcours et des antécédents politiques des signataires de cette plate-forme. Elle a ramené au goût du jour un certain manichéisme, pratique en vigueur pendant plusieurs années et qu’on croyait révolue. Les signataires de la plate-forme forme, accusés de ne pas avoir de troupes, ont été traités de tous les noms. Comme s’ils empêchaient l’opposition de bâtir sa part de coalition. Encore que rien n’est perdu pour eux: ils pourront toujours se regrouper après la publication définitive des candidatures et sortir le candidat unique du chapeau comme un lapin.
En attendant, Paul BIYA, qui n’a rien demandé à personne, voit sa majorité s’élargir. Et quoi qu’en disent ses adversaires, le gain d’une telle opération, qui est plus politique qu’arithmétique, est inestimable. En plus de ses soutiens traditionnels que sont l’UNDP, l’ANDP ou le MDR, il rallie à sa candidature de nouveaux venus. Il séduit des irréductibles et des radicaux qui, hier encore, disaient pis que pendre de lui. En politique seuls les imbéciles ne changent pas d’avis.
L’élection n’est pas gagnée pour autant. Le RDPC et ses alliés restent lucides et prudents. Le chemin est encore long. Mais à ce stade du processus électoral, comment ne pas afficher un petit sourire de satisfaction au regard de la tournure des événements? Au soir du 7 octobre, cette histoire pourrait s’achever comme la pièce de Wole Soyinka intitulée « le lion et la perle ». Souvenez-vous de vos classiques en littérature: Baroka, le vieux chef du village de Ilunjile, avait, à la surprise générale, ravi la belle SIDI, la perle, à Lakunle l’instituteur arrogant et prétentieux qui pensait incarner la modernité et la jeunesse. Moralité: il y a des vieux capables de rassembler et des « jeunes » incapables de se regrouper. Qui vivra verra!
Christophe MIEN ZOK