Une semaine après l’horrible et ignoble attentat qui a coûté la vie à douze personnes – dont de célèbres caricaturistes – au sein de la rédaction de Charlie Hebdo, l’hebdomadaire français est dans les kiosques ce mercredi avec un tirage de plus de 3 millions d’exemplaires.
Comme en 2006, les « survivants » du journal ont choisi de publier à la une un dessin du prophète Mahomet avec ce titre : « Tout est pardonné. Je suis Charlie ». Comme quoi, les balles des kalachnikovs tirées par les terroristes n’ont pas eu raison des bulles sorties des crayons. En d’autres termes, l’obscurantisme, le terrorisme et la barbarie de quelques fanatiques, illuminés ou djihadistes, ne peuvent pas triompher de la liberté d’expression, de la démocratie et de la tolérance de tout un peuple voire du monde entier.Bel épilogue au terme d’une semaine de crise qui a secoué la France : assassinats, prise d’otage, traque des assassins, assaut de la police. Bilan général : 17 morts dont des musulmans, des juifs, des chrétiens et sans doute des athées !Face à l’ampleur de l’événement, une vague d’émotion, de compassion et d’indignation a submergé le monde entier. Peu à peu, la sidération a cédé la place à de nombreuses considérations éthiques et morales : la fraternité, la solidarité, l’égalité des races. Face à l’horreur et à la barbarie, l’épreuve française est devenue internationale. La douleur de la France a contaminé le monde. Dimanche, 11 janvier 2015, la marche républicaine organisée à Paris est devenue mondiale avec la participation d’une cinquantaine de chefs d’Etat et de gouvernement. Les tragédies côtoient très souvent l’histoire. Et les commentateurs, les observateurs et les acteurs politiques n’ont pas eu tort d’employer le mot historique pour qualifier cette journée du 11 janvier 2015.Personne ne peut faire le reproche à la France d’avoir agi et réagi comme elle l’a fait. Chaque peuple se défend avec ses propres armes, en fonction de son histoire et de ses traditions. Aucun démocrate ne peut être insensible aux événements qui viennent de secouer la France. Nul ne peut être indifférent aux atteintes aussi flagrantes à la liberté de la presse.Au-delà du succès politico-médiatique de cette marche parisienne, cette manifestation et la gestion qui en a été faite démontrent une chose : la loi du mort kilométrique reste toujours en vigueur, malgré la théorie du village global. Un mort devant ma porte sera toujours plus « important » que dix morts dans le village voisin ou une centaine de morts cent kilomètres plus loin.En effet, si toutes les victimes du terrorisme se valent, que les auteurs s’appellent Al Qaïda, Aqmi, Shebab, Daesch ou Boko Haram, la même vague d’émotion et de compassassions devrait gagner le monde entier à chaque attentat. Il n’y aurait pas cette désagréable impression de discrimination : d’un côté les « bonnes » victimes du terrorisme ; celles qui comptent et de l’autre les « mauvaises », les oubliées, les laisser – pour compte. Si le terrorisme a un seul visage, de Al Qaïda à Boko Haram en passant par l’Etat islamique ou les Shebabs, alors ses victimes devraient avoir droit à la même sidération et à la même considération. Il n’y a pas d’un côté des bons Charlie « héros du terrorisme » et de l’autre des mauvais Charlots, c’est-à-dire des rigolos, des clowns, des pequenots sans valeur.Le Président Paul Biya l’a bien rappelé le 8 janvier dans son discours face au corps diplomatique : « à menace globale, riposte globale (…) il faut que l’on sache que la distance qui peut séparer un pays des zones de combat n’est pas une assurance tous risques(…) la menace que représentent les djihadistes, Boko Haram et autres Shebabs, ne pourra être levée que par une mobilisation au niveau international ». Avis à tous ces dirigeants africains qui courent éteindre des incendies dans des contrées lointaines alors que la maison de leur voisin brûle. La riposte globale doit commencer par une solidarité locale.
CMZ
Christophe MIEN ZOK