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L'Editorial

Le vol ou l’envol :

On croit rêver. Le ministère en charge du Contrôle Supérieur de l’Etat (CONSUPE) a primé la semaine dernière quelques responsables administratifs et gestionnaires dans le cadre du prix national de l’excellence managériale. 

Excellence, performance, rendement… des mots qui avaient tendance à disparaître du vocabulaire de l’administration publique Camerounaise pourtant si friande de concepts et de néologismes. Ainsi donc, cette technostructure, ce « monstre froid » que dénonçait Paul Biya en 2006, peut encore compter en son sein de rares spécimens capables de se distinguer par l’excellence de leur travail et le sens de l’intérêt général ! Il ne faut désespérer de rien ! Depuis plus d’une décennie en effet, l’administration Camerounaise se distingue davantage par ses tares et ses dérives que par ses performances. A chaque discours, le président de la République égrène un long chapelet de mots qui la caractérisent et de maux qui la minent. Dans ce domaine, il a usé et épuisé tous les euphémismes pour décrire et dénoncer le phénomène : dysfonctionnements, dérèglements. Le mal change régulièrement de nom mais les symptômes, eux, ne varient pas : inertie, corruption, incompétence, malveillance, absentéisme, clientélisme, etc. L’initiative du CONSUPE pourra-t-elle venir à bout de tous ces fléaux qui se sont incrustés à tous les niveaux de l’Administration et qui, tel un cancer, ont déjà produit des métastases ? Quelle sera la thérapie la plus efficace ? Radio ou chimio- thérapie ? Il est encore trop tôt pour se prononcer mais l’initiative du CONSUPE n’en est pas moins louable. Le travail sera néanmoins de très longue haleine. La maladie vient au galop et s’en va au pas…A moins qu’en ce début d’une nouvelle année, les Camerounais en général, les fonctionnaires et agents de l’Etat en particulier, ne prennent une résolution forte : ne plus confondre vol et envol. C’est désormais plus qu’une impression ; une conviction. Dans la plupart des administrations Camerounaises, qu’elles soient publiques, privées ou parapubliques, le substantif vol et le verbe voler ont un seul sens : distraire, soustraire, détourner, piquer, dérober l’argent des caisses. Fortes de cette assertion, quelques brebis galeuses, véritables moutons noirs qui ont fini par ternir l’image de toute l’Administration en raison de leurs agissements et de leurs indélicatesses, conjuguent le verbe voler à tous les temps et à toutes les personnes : je vole, tu as volé, il volera, nous volâmes, vous voliez… Lorsqu’on leur demande de prendre de la hauteur, de voler à tire d’aile vers les hautes cimes de l’excellence, de l’émergence, de la performance, ils préfèrent ramper à ras de terre, à l’instar des reptiles, pour mieux creuser en profondeur et puiser dans les caisses et les budgets. On attendait d’eux qu’ils planent, qu’ils transcendent, pour les dominer de leur science et avec grande conscience, les sujets et les dossiers au lieu de les… survoler. On les croyait capables de devenir des alpinistes virevoltants prêts à se hisser sur les plus hauts sommets, grâce à leur professionnalisme, à leur compétence, à leur endurance. Que non ! Ils sont incapables de s’élever ; ils préfèrent effectuer de la haute voltige sur les finances publiques ou rester au ras des pâquerettes, à l’affût des « miettes ». L’excellence managériale qu’entend promouvoir le Consupe s’accommode mal de ces reptations, synonymes de médiocrité. Le vol ou l’envol, l’envolée vers les hauteurs de l’excellence et les sommets de la performance, ou la plongée dans l’incompétence et la prévarication, l’abime ou les cimes : il faut choisir. C’est la condition sine qua non pour la réussite de la République exemplaire. 

Christophe MIEN ZOK

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