Le suspense est terminé depuis le week-end dernier. Du moins une partie du pan de voile est désormais levée : le prochain congrès du RDPC sera ordinaire et il se tiendra avant l’élection présidentielle prévue en octobre 2011. Ainsi en a décidé le Président national, S.E Paul Biya.
La décision a été rendue publique samedi dernier à travers un communiqué de presse du Secrétaire Général du Comité central. Une ligne, une phrase et quelques mots ont suffi pour mettre un terme à un feuilleton qui tenait l’opinion publique en haleine depuis des mois, feuilleton qui aurait pu s’intituler : « à la recherche du Congrès du RDPC ».
Même si l’attente va devoir se poursuivre encore un peu, une chose est désormais sûre : le Congrès est désormais certain et pas lointain. En plus il sera ordinaire comme le souhaitait l’immense majorité des militants et des sympathisants. Cette annonce seule a suffi pour détendre l’atmosphère. Quoi qu’il en soit, ce Congrès ordinaire annoncé n’en revêt pas moins un caractère … extraordinaire à maints égards.
Il se tient quinze ans après le dernier en date organisé en 1996. L’anachronisme et l’incongruité d’une telle situation n’échappaient plus à personne. Même les militants les plus dociles et les plus disciplinés ne cachaient plus leur embarras face à cette exception qui tendait à s’ériger en règle. Quinze ans que les organes dirigeants du parti vivaient et fonctionnaient en décalage et en déphasage avec la vitalité des organes de base ! Pendant toute cette période, le renouvellement commencé à la base (comité de base, sous-section, section) s’est toujours arrêté aux portes des organes nationaux (comité central, bureau politique, bureaux nationaux de l’OFRDPC et de l’OJRDPC). Le parti donnait l’impression aux observateurs de fonctionner à deux vitesses : une base en constante mutation en raison de son renouvellement permanent et un sommet figé, vitrifié, immobile, car immuable. Inconcevable à l’heure de la modernisation ! La base et le sommet devraient vibrer au même diapason, parler le même langage. Le IIIe Congrès ordinaire annoncé servira à remettre les pendules à l’heure.
Bien que la date exacte ne soit pas connue au jour près, l’annonce du Secrétaire général précise qu’il se tiendra « avant l’élection présidentielle ». Nous l’avons déjà écrit dans ces mêmes colonnes : ce sera la première fois que le RDPC organise un Congrès en année électorale. En effet quelques semaines seulement sépareront la grand’messe du parti et le début de la campagne électorale pour la présidentielle. Les prudents et les peureux voyaient d’un mauvais oeil cette proximité. Ils vont devoir s’en accommoder. Le Président Paul Biya a osé. Il a pris le risque, il a fait le pari qu’un Congrès ordinaire va stimuler l’enthousiasme et libérer les énergies des militants au lieu de les inhiber. Le pari est osé. Mais il est à peu près certain qu’il sera gagnant et payant. Le renouvellement des effectifs au Comité central et au Bureau politique, même s’il peut créer des frustrations et des déceptions à quelques semaines de la présidentielle, est de nature à galvaniser et à redynamiser les troupes. Entre la rancœur et même la rancune des déçus de cette partie de chaises musicale, annoncée, Paul Biya mise sur le zèle et le prosélytisme des néophytes. Ils battront campagne avec la hargne, la fougue, la hardiesse et la pugnacité de ceux qui ont tout à donner et à prouver. Le parti et son candidat à la présidentielle ne le regretteront certainement pas.
Au-delà des bénéfices et des avantages par rapport à l’élection présidentielle, le RDPC avait besoin d’envoyer un signal et un message à sa jeunesse militante : l’ascenseur n’est pas bloqué au sein du parti. Chaque militant peut aspirer à atteindre le plafond. Le congrès ordinaire constitue l’escalier qui y mène. Ceux qui avaient trente ou quarante ans en 1995 et 1996 lorsque le Président national louait les vertus de l’ouverture du parti aux femmes et aux jeunes ont dû se sentir trahis quelque part tout au long des quinze dernières années. Le Congrès ordinaire leur redonne espoir, non seulement à eux mais aussi à tous ceux qui frappent à la porte du Comité central et du Bureau politique. Relever pareil défi à la veille d’une élection présidentielle, sans risque et sans dégât pour le parti, est à la portée du RDPC.
En définitive et nonobstant les appréhensions, du reste légitimes, des uns et des autres, ce IIIe Congrès ordinaire tant attendu, enfin annoncé et confirmé ne peut qu’avoir un impact et des effets extraordinaires sur le parti.
Christophe MIEN ZOK