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L'Editorial

La rancune de l’histoire :

L’explosion – ou l’implosion – redoutée n’a pas eu lieu. La sécession et la partition du Cameroun attendront encore.

L’explosion – ou l’implosion – redoutée n’a pas eu lieu. La sécession et la partition du Cameroun attendront encore. La proclamation d’indépendance d’un Etat imaginaire annoncé par certains à cor et cri, urbi et orbi, ce 1er octobre 2017 restera dans les tiroirs. Les uns et les autres ayant fini de montrer les muscles, de bomber les torses et les pectoraux ; à présent que le sang, les larmes, la sueur et l’adrénaline ont cessé de couler, il est temps de se rendre compte qu’on va droit vers une impasse, une voie sans issue. Les soubresauts, les spasmes, les convulsions et les velléités irrédentistes ne peuvent avoir qu’une issue : le chaos. L’escalade de la violence mène au néant. Dieu merci, nous n’y sommes pas encore. Le point de non-retour n’est pas atteint. Les ponts ne sont pas encore coupés ou détruits. Il faut à tout prix éviter les chemins sanglants et ensanglantés de la haine et de la guerre civile proposés par les extrémistes et les jusqu’auboutistes de tous bords.
Maintenant que le 1er octobre s’est rappelé et imposé de nouveau dans nos mémoires, place au bon sens, à la raison et à l’intelligence. Or les connaissances qui permettent de renforcer ces trois notions s’apprennent pour l’essentiel à l’école. Cette même école que certains veulent interdire aux enfants ! Passons ! Quoiqu’il en soit, les évènements du 1er octobre, comme ceux des jours d’avant et d’après, ont remis au goût du jour la nécessité de «redécouvrir l’histoire du Cameroun» comme le rappelait si bien le Secrétaire Général du Comité Central dans un communiqué publié la semaine dernière. Redécouvrir l’histoire du Cameroun, c’est rappeler qu’au commencement, bien avant l’arrivée des occidentaux, il n’y avait ni anglophone ni francophone. C’est après la première guerre mondiale, sanctionnée par la défaite de l’Allemagne, que français et britanniques se partagent le Cameroun comme un vulgaire butin de guerre. Dès lors, les patriotes et nationalistes camerounais n’auront de cesse dans leur quête de l’émancipation et de l’indépendance de «panser» cette blessure de l’histoire afin de reconstituer l’unité perdue. Cette longue marche vers l’unité se fera en plusieurs étapes : 1958 ; 1er janvier 1960 ; 1er octobre 1961 ; 20 mai 1972 ; 1984 ; etc. Ce fut un parcours du combattant avec des hauts et des bas, des roses et des épines, des approximations et des fulgurances, des erreurs et des omissions. La perfection n’est pas humaine…
Ainsi va l’histoire du Cameroun. Nous devons l’assumer sans la remettre en cause. D’où les appels à la raison qui s’élèvent de toutes parts. A commencer par Paul Biya lui-même qui, dès le 31 décembre 2016 condamnait de «façon énergique tous les actes de violence, d’où qu’ils viennent, quel qu’en soient les auteurs (…) Que l’on se comprenne bien, il n’est pas interdit d’exprimer des préoccupations dans la République. En revanche, rien de grand ne peut se construire dans la surenchère verbale, la violence de rue et le défi à l’autorité. Seul le dialogue serein permet de trouver et d’apporter des solutions durables aux problèmes. Les voix qui se sont exprimées ont été toutes entendues. Elles ont, dans bien des cas, soulevé des questions de fond que l’on ne saurait négliger. J’ai instruit le Gouvernement d’engager un dialogue franc avec les différentes parties concernées pour trouver des réponses appropriées aux questions posées.» Aussitôt dit, aussitôt fait : des mesures concrètes ont été prises dans le sens de l’apaisement. Dix mois après, ce discours du Président Biya reste d’actualité. Mais «toutes» les parties concernées ont-elles en retour accepté de participer, «sans préjugés« aux différentes discussions comme les y invitait le Président Biya ? Chacun peut répondre aisément à cette question au regard de la surenchère verbale et de l’escalade des actes posés sur le terrain.
A la suite de Paul Biya et dans une symphonie remarquable, toutes les grandes organisations internationales, de l’ONU à l’Union européenne en passant par l’Organisation Internationale pour la Francophonie et le Commonwealth, appellent à un dialogue «sincère, ouvert et inclusif», à la paix, à la non-violence. Toutes expriment leur attachement à la «préservation de l’unité, de la stabilité et de l’intégrité» du pays. En creux, ces prises de position condamnent l’aventure des partisans de la sécession et mettent le Gouvernement face à ses responsabilités. La poignée de radicaux et d’extrémistes qui poussent à la sécession finiront-ils par entendre ces voix de la sagesse et de la raison ? il faut le souhaiter et l’espérer. Si l’actualité et les actes d’aujourd’hui constituent l’histoire de demain, alors tous ceux-là qui jouent aux pyromanes et aux apprentis-sorciers avec l’avenir du Cameroun doivent savoir que «l’histoire est plus rancunière que les hommes« comme le disait Napoléon Bonaparte.
Et nous ajoutons qu’outre la rancune, l’histoire peut aussi se montrer revancharde. L’avenir d’un pays comme le Cameroun ne se joue pas aux dés, au loto, à la roulette russe, à quelque jeu de hasard ou coup de poker que ce soit. Les marionnettistes qui tirent les ficelles de la sécession devraient le savoir. Dans son histoire courte mais tourmentée, le Cameroun en a déjà payé un prix humain très élevé. Il ne veut plus revivre cela aujourd’hui et demain. L’histoire est rancunière.

Par Christophe Mien Zok

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