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La Politique

pour conclure : Ecrira bien qui écrira le dernier…

Depuis bientôt un mois, le peuple Camerounais et l’opinion internationale sont tenus en haleine par une activité et une actualité épistolaires assez singulières animées par une personnalité qui avait su jusqu’à présent cacher ses talents d’écrivain public.

Placé en détention préventive par la justice, Marafa Hamidou Yaya, membre du Bureau politique du Rdpc depuis 1996, ancien ministre d’Etat, Secrétaire général de la Présidence de la République, ex-ministre d’Etat, ministre de l’Administration territoriale et de la décentralisation, président du conseil d’Administration du Feicom, inonde littéralement l’espace public de lettres ouvertes tantôt adressées au président de la République, tantôt au peuple camerounais. Si ces correspondances, qui frisent parfois l’irrévérence, l’offense et la provocation vis-à-vis du président de la République, traitaient seulement des faits pour lesquels M. Marafa est placé en détention préventive, on se serait bien gardé de lui répondre. Pour au moins deux raisons : d’une part, face à la justice, chacun se défend comme il peut et comme il veut, d’autre part et jusqu’à preuve du contraire, le camarade Marafa reste membre du Bureau politique du Rdpc dont il n’a ni démissionné ni été exclu. Oui le Rdpc est resté jusque-là discret voire silencieux sur cette actualité parce que Marafa Hamidou Yaya demeure membre du Bureau politique d’un parti, le Rdpc, qui respecte, mieux que quiconque, la présomption d’innocence. Peut-être a-t-il présenté au président national ou au secrétaire général du Comité central une lettre de démission. Celle-ci a sans doute été refusée comme ses multiples tentatives de démissionner du gouvernement. Passons. Comme pour la plupart de ses militants incarcérés ou détenus, le parti ne veut pas céder à l’acharnement et participer au lynchage. Il laisse fonctionner les institutions de la République et l’Etat de  droit dont ces hauts commis ont pour la plupart participé à l’édification et vanté les mérites.Ce « modus vivendi » n’avait plus lieu d’être dès lorsque le camarade Marafa Hamidou Yaya, délaissant le terrain judiciaire où il se livre à un plaidoyer prodomo, fait des incursions dans le domaine politique avec des insinuations, des allusions, des accusations et des prises de position qui ne pouvaient plus laisser indifférents les militants dignes de ce nom.A partir du moment où il se déclare « porteur d’un projet mettant en avant les exigences de paix et de justice permettant de bâtir une société de confiance », notre (ex) camarade quitte définitivement le terrain judiciaire, coupe le cordon ombilical qui le lie au Rdpc et délivre les militants du devoir de solidarité à son égard. Il a trahi la confiance de Paul Biya et des militants. Entendons-nous bien : il ne s’agit point de blâmer, encore moins de condamner, l’ambition d’un homme qui croit à son destin présidentiel. C’est son droit. Encore que le Rdpc se reconnait entièrement et profondément dans les valeurs et les options de paix et de justice qu’il entend promouvoir ou … plagier. Non, du tout, il ne s’agit pas de cela. Ce dont il s’agit ici c’est de questionner la démarche (d’aucuns diront la duplicité) et l’attitude (d’autres parlent d’ingratitude et d’hypocrisie) d’un homme qui « n’avai[t] aucune envie d’être nommé président de la République » (sic) mais qui n’a jamais trouvé la force ou le courage de démissionner de ses fonctions ministérielles. Et qui a attendu d’être démis de ce paste pour annoncer aux Camerounais ses grandes ambitions pour le Cameroun. Un homme qui, jusqu’au 16 avril 2012, jour de son placement en détention provisoire, était membre du Bureau politique du Rdpc et avait la latitude, à ce titre, de faire des suggestions à son parti pour l’amélioration du projet de loi portant code électoral en discussion à l’Assemblée nationale (le texte ne sera promulgué que le 19 avril 2012). Et qui s’est bien gardé de le faire afin de soigner son image de présidentiable aux yeux du peuple camerounais. Tout le monde n’a pas la mémoire courte. Personne n’est dupe.Masochisme De son lieu de détention, M. Marafa décortique le code électoral et persiste à « dire que tel qu’organisé et tel qu’il fonctionne, Elecam ne pourra pas organiser les élections législatives et municipales ». Aucun Camerounais n’a oublié que depuis 2002, celui qui parle ainsi est celui-là même qui a défendu avec zèle la plupart des projets loi à caractère électoral, y compris la loi créant Elecam ou la loi sur la révision constitutionnelle de 2008. Que n’avait-il alors saisi celle belle fenêtre d’opportunité pour marquer ses désaccords avec Paul Biya et tirer sa révérence ? Il aurait alors fait une sortie par la grande porte et revêtir les habits de sauveur dont il veut se parer aujourd’hui. Au contraire, tous les députés, notamment ceux du groupe parlementaire du Rdpc, se souviennent de l’intransigeance de l’ex-ministre d’Etat, qui n’admettait aucun amendement, aucune proposition, aucune suggestion pour l’amélioration des projets qu’il défendait, « bec et ongles ». Qu’il s’agisse de duplicité, de masochisme ou de ponce-pilatisme, un tel comportement laisse  tout de même pantois et songeur. En tout cas, le moment venu, chaque camerounais appréciera, analysera et se fera son opinion sur les qualités d’homme d’Etat ou de leader politique de Marafa Hamidou Yaya. Il est surprenant et amusant de voir certains tomber en pâmoison et se prosterner à ses pieds à la suite de quelques déclarations de bonne intention. Ce sont les mêmes qui, à l’instar du SDF, voyaient en lui l’incarnation du diable en matière d’organisation des élections, de violation des libertés publiques ou de répression des manifestations. Les temps ont bien changé ! Et la mémoire est essentiellement oublieuse. Il suffit qu’un haut cadre du Rdpc dise du mal de Paul Biya pour qu’il soit en odeur de sainteté auprès du SDF qui oublie aussitôt ses grands et bons principes sur la gouvernance, la corruption… Comprenne qui pourra ! Pour l’instant, c’est le temps de la justice. Le temps de la politique arrivera. Et alors écrira bien qui écrira le dernier.
                                                                                                                                                                                                                                                                                    Par Christophe Mien Zok

Christophe MIEN ZOK

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