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Rond comme un ballon

Les Camerounais sont passés presque sans transition de 2021 à 2022. Au crépuscule de 2021, les rêves, les songes, et même les pires cauchemars, avaient constamment la forme d’un ballon de foot, qu’il s’agisse de l’élection du président de la Fecafoot ou de la tenue de la 33e édition de la coupe d’Afrique des nations de football. Depuis des mois, un ballon géant flotte au-dessus de nos têtes pour nous rappeler que la plus grande fête continentale du football se tient au Cameroun du 9 janvier au 6 février 2022. On a tourné la page 2021 avec le foot, on ouvre celle de 2022 par le même sujet. Les fêtes de fin et de début d’année vont ainsi jouer les prolongations pendant plus d’un mois. À l’aube de cette année 2022 et à quatre jours de l’ouverture du tournoi, la clameur populaire et médiatique ne fait que monter. Difficile de rater un tel événement même si pendant les fêtes, on a abusé de quelques ballons de…vin.
En tout cas, il plane dans l’air comme une douce euphorie, malgré les menaces, factices ou réelles, de la pandémie du covid-19, et les habituelles manœuvres souterraines des empêcheurs de tourner en…rond. Ils n’ont qu’à bien se tenir: le ballon sera rond pour tout le monde et il n’est pas certain que la majorité des Camerounais acceptent que leur fête soit gâchée par quelques aigris. Après tous les sacrifices financiers consentis par l’Etat, au terme de tous les rebondissements subis et vécus quant à l’organisation de cette compétition, à l’issue du suspense insoutenable de dernière minute orchestré par la CAF et la FIFA, les Camerounais n’aspirent qu’à une chose; vivre pleinement la CAN, la savourer et la sucer à belles dents et, si possible, la voir s’achever en apothéose le 6 février au soir par un…sixième sacre des Lions Indomptables. Une telle entrée en fanfare dans la nouvelle année ne sera alors qu’une juste et légitime récompense pour un peuple accablé depuis quelques années par toutes sortes de crises.
Et si jamais le sort venait à être contraire à leur équipe de football, les Camerounais, « peuple uni et indomptable », résilient et tolérant, clairvoyant et fair-play, saura toujours trouver en lui-même la force, les ressorts et les ressources nécessaires pour surmonter sa déception. Le football a beau charrier d’importants enjeux financiers, économiques, culturels et géostratégiques, il n’en reste pas moins, avant tout, un jeu à l’instar de la politique que certains veulent confondre, hélas, avec la corrida ou la vendetta. Il faudra faire preuve d’une vigilance de tous les instants pour déjouer ces pièges afin de se focaliser sur l’essentiel: l’image, l’honneur et la grandeur du Cameroun. Nous sommes tous des passagers embarqués dans un ballon géant, une montgolfière, qui vogue au gré de la direction du vent mais aussi et surtout des coups de barre de chaque passager.
Heureusement qu’il n’y a pas que le football dans la vie. Après le 6 février 2022, la vie va continuer son cours normal. D’autres défis, de nouveaux enjeux, des batailles aussi essentielles que vitales vont interpeller les Camerounais dans les prochains mois. En bon capitaine de vaisseau, Paul BIYA ne perd pas de vue tous ces aspects qui constituent pour lui autant de boussoles du tableau de bord de son magistère. La décentralisation constitue l’un de ces chantiers prioritaires. À la faveur de décrets présidentiels pris récemment, les Conseils régionaux disposent désormais d’un organigramme-type et peuvent se déployer pleinement sur le plan administratif et opérationnel. L’Université aussi se « décentralise »: chacune des dix régions du Cameroun dispose désormais d’une université d’Etat. Au nom du développement équilibré entre les Régions, l’Est, le Nord et le Sud rattrapent leur retard et auront aussi leur université. Autant de bonnes nouvelles qui sont tombées sur le pays le 31 décembre au soir et ont contribué à rendre la fête plus belle. L’euphorie ne doit pas cependant faire oublier les règles de bonne gestion à tous les gestionnaires publics: qu’il s’agisse de la CAN ou des autres secteurs de la vie publique, les détournements de fonds et la corruption sont passibles de poursuites devant les juridictions. En cas d’atteinte avérée à la fortune publique, les auteurs d’indélicatesses pourraient se voir infliger un carton rouge et se retrouver au…ballon! Triste et cruelle fin de match.

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