Deux mois déjà que la Russie et l’Ukraine se font la guerre. Le président ukrainien, ancien humoriste professionnel à succès, découvre à ses dépens que la guerre n’est pas une blague ou un sketch. Ceux qui l’avaient incité à provoquer le puissant voisin russe multiplient les déclarations de bonnes intentions alors que les villes et le peuple ukrainiens croulent sous le poids des bombes. Le bilan humain et matériel est déjà très lourd et sur le plan humanitaire, de nombreux ukrainiens quittent chaque jour leur pays pour se réfugier un peu partout en Europe. Et la guerre risque de prendre une nouvelle tournure avec les nouvelles livraisons d’armes lourdes annoncées par divers grands pays occidentaux. Hélas, plus le conflit dure dans le temps, plus ses conséquences s’étendent au monde entier. Les deux pays belligérants figurent en effet parmi les principaux producteurs de blé, de maïs ou d’engrais. Depuis plus d’un mois, l’onde de choc se propage à travers la planète et n’épargne aucun pays ou secteur: la finance, l’énergie, l’agro-industrie, les transports, l’alimentation, etc. L’inflation est en hausse un peu partout suite aux difficultés d’approvisionnement et au renchérissement des prix de certaines matières premières. Le maïs, le blé, l’orge, les engrais se font rares; le prix du pain a augmenté. Ces bouleversements économiques annoncent des remous sociaux si les gouvernements ne prennent pas des mesures appropriées.
Le tableau est peu reluisant et il pourrait s’assombrir davantage, mondialisation oblige. Le monde n’avait pas besoin de cette autre catastrophe alors qu’il subit encore les contrecoups de la pandémie du covid-19. Le Cameroun n’est pas épargné par ces chamboulements économiques et ces risques de bouleversements sociaux. Chaque pays met en œuvre son plan de riposte en fonction de ses réalités et de ses atouts. Tel est le défi qui interpelle le gouvernement camerounais depuis quelques semaines. Les pouvoirs publics multiplient les concertations avec les acteurs sociaux et les syndicats, renforcent la sensibilisation du public, mobilisent les populations en vue d’un changement de mentalités en matière de consommation alimentaire. Car le nœud du problème est là: alimentaire mon cher Watson, pour pasticher Sherlock Holmes. Malgré son grand potentiel agricole, le Cameroun ne consomme pas ce qu’il produit et est devenu un peu trop dépendant du blé importé transformé en farine localement en vue de la fabrication du pain et des pâtes alimentaires. Comment sortir de cette dépendance extérieure?
Par le travail! Nous devons travailler plus et produire davantage des aliments que nous avons tendance à snober. Après le travail, viendra le changement de mentalités pour cesser de croire que le salut vient de l’extérieur. Ensuite par l’imagination et l’invention pour pouvoir transformer et conserver nos produits. Tous ces tubercules, manioc, patate, macabo, ignames et ces bananes plantain qui sont cultivés un peu partout pourraient être transformés en farine, mais ne peuvent être conservés longtemps faute d’un process industriel. Actuellement dans nos localités, c’est la saison des avocats. Ils sont proposés en tas, dans des seaux ou des bassines. Connaissant la durée de vie d’un avocat une fois cueilli, on imagine aisément les énormes pertes enregistrées par les producteurs.
Et pourtant, la tendance peut être inversée en matière de consommation alimentaire. Il y a plusieurs années, le Président Paul Biya avait lancé le slogan « consommons camerounais » et en avait fait une cause nationale. Ce combat mérite plus que jamais d’être repris et amplifié. Voilà assurément du grain à moudre pour les partis politiques en matière de sensibilisation et de mobilisation. Le Rdpc, qui a déjà mené aux côtés du gouvernement plusieurs combats de ce genre, notamment la lutte contre la pauvreté à travers le concept de l’activité créatrice, devrait y jouer un rôle de premier plan grâce à ses structures et à son implantation territoriales. Quel impact formidable on aurait si les organes de base se transformaient en unités non seulement de sensibilisation et de production mais aussi de production! Prenons-en de la…graine!