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L'Editorial

De la turpitude à la surenchère :

Qu’importe les surenchères, les tentatives de récupération, l’impression
d’une cacophonie. C’est la fin qui justifie les moyens.

Depuis la semaine dernière, Elecam a interrompu les opérations de révision des listes électorales entamées le 5 janvier 2012  comme le prévoit la loi. En lieu et place de la révision, ce sera la refonte, c’est-à-dire une remise à zéro des listes électorales. La dernière opération du genre remonte à 2004. La plupart des acteurs politiques sont satisfaits par cette décision d’Elecam car elle va dans le sens d’une plus grande transparence du processus électoral bâtie sur la confiance.A l’instar des autres formations politiques, le Rdpc prend acte de cette décision sans état d’âme car elle relève de la seule responsabilité d’Elecam, organe indépendant chargé de la gestion et de l’organisation des élections au Cameroun. Pour des raisons qui lui sont sans doute propres, Elecam avait choisi en début d’année de procéder à une révision. D’ailleurs, fidèle à une tradition désormais bien établie, la hiérarchie du parti avait déjà donné les instructions nécessaires aux responsables des organes de base à travers une circulaire du secrétaire général du Comité Central datée du 31 janvier 2012 « en vue d’assurer une participation efficace du Rdpc à cette opération [la révision] dont l’importance politique est avérée ». Quatre principales missions étaient alors assignées aux équipes du parti, en rapport avec les responsables locaux d’Elecam. 1. Veiller à la participation effective et assidue des  représentants du Rdpc aux travaux des commissions mixtes d’inscription sur les listes électorales ; 2. Animer l’intensification des inscriptions par une sensibilisation de proximité et une grande mobilisation des militants et sympathisants du parti non inscrits sur les listes électorales, à se faire enregistrer auprès des équipes locales d’Elecam ; 3. Accélérer l’achèvement de la distribution des cartes d’électeur aux militants et sympathisants du Rdpc qui, pour le scrutin présidentiel du 9 octobre 2011, n’ont pas pu rentrer en possession de cette pièce ; 4. Poursuivre l’action d’appui à la délivrance de la carte nationale d’identité au profit des militants et sympathisants du Rdpc en âge de voter en 2012, c’est-à-dire âgés de 20 ans au moins. Un mois plus tard, Elecam annonce que toutes les conditions, financières notamment, sont désormais réunies pour organiser une refonte des listes électorales. Pour le Rdpc, rien ne change fondamentalement. Le parti doit être présent car les absents ont toujours tort. A quoi sert encore la polémique ? Il faut tout mettre en œuvre pour que la refonte annoncée soit une réussite et permette de corriger les dysfonctionnements constatés lors de la présidentielle d’octobre 2011.Toutefois, la bonne volonté et les moyens financiers mis en œuvre par Elecam ne suffiront pas pour garantir la réussite de l’opération. En effet, on ne le dira jamais assez : qu’il s’agisse de la révision ou de la refonte, les partis politiques ont un rôle primordial à jouer au sein des commissions mixtes créées pour la circonstance. Qui, mieux que le représentant d’un parti, peut défendre ses intérêts au moment des inscriptions, de la distribution des cartes ou dans les bureaux de vote ? A force de focaliser l’attention sur les aspects secondaires du problème, les partis de l’opposition tentent d’exonérer leurs propres responsabilités. Contrairement à ce que prévoit la loi, leurs représentants sont généralement absents à toutes les étapes du travail effectué par les commissions : inscriptions, distribution des cartes électorales et présence dans les bureaux de vote. La surenchère sur l’exigence des cartes biométriques participe de la même volonté de détourner l’attention de l’opinion publique. Comprenons-nous bien. Si Elecam, dont c’est la compétence exclusive, décide d’établir des cartes biométriques et qu’elle en a les moyens financiers, personne ne s’en plaindra dès lors que cela concourt à la consolidation de la transparence et de la confiance entre tous les acteurs engagés dans le processus électoral. Mais qu’on se le dise une fois pour toutes. La refonte des listes et les éventuelles cartes biométriques seront insuffisantes si les partis politiques eux-mêmes ne jouent pas pleinement le jeu démocratique : sensibiliser, mobiliser, éduquer, séduire les électeurs, participer effectivement aux opérations dévolues aux commissions mixtes. C’est trop facile de se défausser sur les autres. Nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude.

Christophe MIEN ZOK

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