Malgré l’abondance de talents et un riche héritage sportif, le secteur du football au Cameroun peine à décoller, miné par des querelles institutionnelles et une gestion critiquée.
Les crampons des lions indomptables ont souvent résonné au sommet de l’Afrique et du monde, faisant du Cameroun une terre de football respectée. Mais derrière ce prestige historique se cache une réalité bien moins reluisante : celle d’un championnat national en crise, affaibli par une gouvernance mal ficelée, une gestion financière nébuleuse et des tensions de plus en plus vives entre la Fédération camerounaise de football (Fecafoot) et les clubs d’élite.
Depuis quelques saisons, les clubs traversent un véritable désert économique. La centralisation des ressources par la Fecafoot, censée favoriser une redistribution équitable, s’est révélée contre-productive. Nombre de clubs dénoncent le non-versement des subventions promises, ce qui les prive de moyens pour assurer le paiement des salaires, l’organisation logistique des matchs ou même le simple maintien de leurs activités. Résultat : des forfaits en pleine saison, un affaiblissement de la compétitivité, et une perte de crédibilité nationale et internationale.
La Fecafoot, pourtant pilier du développement footballistique, se retrouve aujourd’hui au cœur des critiques. Les accusations fusent : autoritarisme, favoritisme, décisions unilatérales… Les dirigeants de clubs estiment être relégués au second plan, réduits au silence dans un système qu’ils considèrent comme verrouillé. Le collectif des clubs d’élite du Cameroun a tiré la sonnette d’alarme, appelant à une gouvernance plus participative, transparente et respectueuse des engagements.
Pour sortir de cette impasse, des voix s’élèvent en faveur d’une réforme en profondeur. Pour Joseph Ondobo, analyste sportif « Il est urgent de revoir le modèle de financement, d’impliquer davantage le secteur privé et de garantir une gestion collégiale des compétitions ». Même son de cloche chez Marc Onana, universitaire qui prône que « la réhabilitation de la confiance entre la Fecafoot et les clubs passe par une écoute mutuelle et des actes forts, à la hauteur des ambitions d’un pays qui a tant donné au football africain ».
Le Cameroun dispose d’un vivier de talents exceptionnel et d’un public passionné. Il ne manque que la volonté politique et institutionnelle pour remettre le sport roi sur ses rails. Car si les Lions indomptables ont souvent rugi sur les pelouses du monde, il est temps que la base de cette pyramide retrouve elle aussi sa fierté et sa stabilité.
Le football camerounais peut encore écrire de grandes pages. Mais pour cela, il faut en finir avec les jeux d’ombres et reconstruire, enfin, sur des bases solides.
Charles Ebode