Site Web Officiel du Journal L'Action
L'Actualité

Lutte contre la corruption : Dans les serres de l’Epervier

L’ancien Premier ministre Ephraïm Inoni et l’ex ministre d’Etat, Marafa
Hamidou Yaya, ont été placés en détention préventive lundi. Ce qui
marque, une fois de plus, la détermination du pouvoir à frapper sans
complaisance ceux qui se sont montrés indélicats dans la gestion de la
fortune publique.

Paul Biya l’a affirmé : « Ma détermination à combattre ce fléau est totale et […] la lutte contre la corruption va se poursuivre en s’intensifiant, sans complaisance, sans discrimination, indépendamment du statut social ou de l’appartenance politique des personnes incriminées. Personne ne pourra se considérer comme étant au-dessus des lois. » Dans son discours à l’ouverture du troisième congrès ordinaire du RDPC le 15 septembre 2011, il présentait aux militants rassemblés au palais des congrès de Yaoundé, mais aussi à tous les Camerounais et à l’opinion internationale, les avancées du dispositif institutionnel mis en place pour réduire la corruption à sa plus simple expression. Ce jour-là, le président de la République se félicitait du travail de la Commission nationale anti-corruption, de l’Agence nationale d’investigation financière ou des services du Contrôle supérieur de l’Etat qui, patiemment, contribuent tous les jours à réduire à sa plus simple expression ce fléau qui a privé le Cameroun d’importantes ressources, tant nécessaires pour son développement.
Le 8 octobre 2011, alors qu’il présidait la cérémonie de pose de la première pierre du port en eau profonde de Kribi, Paul Biya renchérissait : « Je tiens cependant à préciser que, pour que cette politique réussisse (les grandes réalisations, Ndlr), nous devons redoubler d’ardeur au travail, nous devons absolument éradiquer définitivement le fléau de la corruption qui affecte gravement le développement de notre pays. Dites-vous bien que lorsqu’une personne vole l’Etat, ce n’est pas seulement l’Etat qu’elle vole, mais que c’est chacun d’entre nous qui est dépossédé !
C’est la raison pour laquelle je m’engage devant vous aujourd’hui à poursuivre et à intensifier la lutte contre la corruption qui ralentit notre croissance et prive la communauté camerounaise tout entière des moyens nécessaires à son plein épanouissement. »
En décidant de l’incarcération d’Ephraïm Inoni et de Marafa Hamidou Yaya pour « détournement de déniers publics en coaction et complicité », la justice camerounaise a décidé de loger tous les protagonistes, ou presque, de l’affaire de l’avion présidentiel, l’Albatros, dans la même enseigne. Afin d’y voir plus clair et de dégager les responsabilités de chacune des personnes incriminées dans ce qui aurait pu s’apparenter à une atteinte à la sûreté de l’Etat.
Petit rappel de faits
L’affaire “Albatros” est née du projet du chef de l’Etat camerounais d’acquérir un avion qui devait remplacer le Pélican, l’ancien avion, acquis du temps de l’ancien Président. C’est en 2001 en effet que la présidence de la République dégage un budget pour l’achat d’un nouvel avion et dépêche une délégation de hauts responsables aux Etats Unis pour cette mission. Après de longues et laborieuses tractations qui dureront trois ans, l’avion baptisé “Albatros” – un Boeing 767 – est acheté et livré au Cameroun en avril 2004. D’une longueur de 48,5 m pour 47,6 m d’envergure, il est classé par les experts aéronautiques dans la catégorie VIP et bénéficie d’un aménagement spécial et luxueux réalisé à son bord.
Mais le jour du vol inaugural, l’avion avec à son bord le Président Paul Biya, son épouse et ses enfants, en route pour l’Europe, est victime de graves problèmes techniques qui le forcent à se poser en catastrophe sur l’aéroport de Douala. Ce sera l’unique fois que le Président l’utilisera et il sera renvoyé quelques mois plus tard.
L’opinion découvre alors qu’il s’agissait non pas d’un avion neuf, mais d’un appareil acheté d’occasion, que même la compagnie aérienne malgache avait décidé de mettre à la casse.
L’homme d’affaires Yves Michel Fotso, l’un des principaux suspects, est d’ailleurs prêt, selon un document publié par La Presse la semaine dernière, à rembourser ce qui lui est imputé dans cette affaire, près de 15 milliards de francs Cfa, pour recouvrer sa liberté. Mais cette démarche ne peut être avalisée que par le tribunal criminel spécial nouvellement crée (voir encadré).
Mais la lutte contre la corruption au Cameroun, et Paul Biya l’a dit et redit, ne saurait s’arrêter à « ces quelques cas emblématiques », avec au tableau de chasse des figures comme Mounchipou Seidou, Titus Edzoa, Emmanuel Gérard Ondo Ndong, Gilles Roger Belinga, Joseph Edou Zacheus Forjindam, Alphonse Siyam Siewe, Edouard Etonde Ekotto, Paulin Abono, Jean Marie Atangana Mebara, Jerôme Mendouga, Polycarpe Abah Abah, Urbain Olanguena Awono, Peter Akumchi Awah, Paul Ngamo Hamani et toutes les personnes de leur entourage qui ont contribué ou participé aux détournements. Cette bataille engagée pour sécuriser la fortune publique doit véritablement s’étendre, pour débusquer ces fonctionnaires pour qui l’Epervier ne chasse que de grosses proies. Car à ce niveau aussi, les dégâts et dérives sont considérables. Les crédits détournés de matériels de bureau, les missions fictives, les évacuations sanitaires de malades imaginaires sont quelques postes de dépenses qui pompent les finances publiques et alourdissent les crédits alloués au fonctionnement de l’administration camerounaise. C’est la raison pour laquelle les institutions chargées de lutter contre la corruption doivent davantage sévir, de sorte à empêcher toute velléité.
 William Pascal Balla

William Pascal Balla

Articles liés