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La Politique

Maurice Kamto : Un prof dans la rue

Le candidat malheureux aux législatives dans la circonscription du Mfoundi a donné un point de presse mardi. Il demande au pouvoir de se préparer à l’insurrection.

Il n’est jamais facile de se remettre d’une déculottée. Maurice Kamto, agrégé de droit, en a fait l’amère expérience à l’issue du double scrutin du 30 septembre. En mauvais perdant, il cherche le bouc-émissaire. Naturellement, il a choisi le Rdpc pour déverser sa bile, oubliant qu’un vieux renard de la politique, John Fru Ndi du Sdf, avait dit à l’un de ses lieutenants trop collé à ses théories livresques : « Politic no be book ». Traduction : un intellectuel ne fait pas forcément un bon politique. Malheureusement pour Kamto, il l’apprend aujourd’hui à ses dépens. Devant quelques militants venus l’écouter, après les nombreuses mésaventures de sa campagne dans le Mfoundi, le prof, comme dans un amphi, a voulu faire l’analyse du processus électoral qui touche à sa fin. Il accuse pêle-mêle le Rdpc, Elecam, l’administration « au plus haut niveau » ( ?)…  Les militaires aussi en prennent pour leurs grades, tout comme les autres électeurs qui n’ont pas su défendre leur vote. Pour Kamto, « Nous avons assisté à l’expression même de la barbarie électorale ». Les experts prendront peut-être le temps de nous expliquer à quoi renvoie ce nouveau concept.
Un brin lucide, l’ancien ministre délégué, qui est toujours très mal à l’aise lorsqu’on évoque les juteux marchés obtenus au ministère de la Justice, conclut : « Dans notre posture légaliste et républicaine, nous avons accepté courageusement cette décision. » A la bonne heure ! Mais qui diable est arrivé à Elecam, après les délais, pour y déposer ses listes de candidatures ? Qui doit son salut à la Cour suprême, aujourd’hui vilipendée, alors que tout le monde le savait coincé par la loi électorale ? Mais Kamto ne s’arrête pas là. Il affirme que son parti est depuis le 30 septembre 2013 la première force politique dans le Mfoundi et les Hauts-Plateaux, son département d’origine. Si, dans le Mfoundi, on peut comprendre sa pseudo-percée, due en réalité aux complicités dans le Rdpc (on a surpris des militants du Rdpc, poussés par l’instinct tribal, en train de donner des consignes de vote en faveur du parti de Kamto au quartier Manguiers et à Nkolbisson) et au monnayage des voix (le Mrc a déployé un dispositif dans ce sens à Yaoundé II, aidé en cela par une banque bien connue de la place), l’on peut regretter que Kamto ait, comme Ndam Njoya, étalé ses errements tribalistes, à la différence d’un Olivier Bilé, qui n’est peut-être pas agrégé, mais qui a su sortir de son département d’origine pour cueillir une commune ailleurs. Kamto veut peut-être parler aux Camerounais. Il devrait commencer par comprendre que ces Camerounais là sont fatigués de l’hypocrisie des hommes politiques de sa trempe, qui tiennent un discours classique devant les caméras et poussent à un vote tribal dans d’autres cercles. Comment donc comprendre cet « Attachement obsessionnel au changement dans la paix » dont parle Kamto si, dans le même temps, le pseudo apôtre de la paix appelle le pouvoir à « Procéder à l’achat des armes pour affronter le peuple » ? Levée de bouclierVoilà un membre de la Commission du droit international des Nations unies, organisme chargé d’assurer la paix et la sécurité dans le monde, qui appelle ses affidés à l’insurrection armée. Kamto a-t-il enfin pris conscience qu’il n’a pas l’étoffe d’un David ? Est-il assez calme pour comprendre que le Rdpc ne se laisse pas ébranler par le premier venu, un si petit poucet ? Peut-il enfin faire preuve d’humilité et se dire que la bataille désespérée qu’il a pensé engager a été mal conçue stratégiquement et que, par conséquent, il devrait plutôt procéder à une remise en question et, s’il le souhaite, se mettre à l’école du Rdpc ?Sur le Net, beaucoup dénie à Kamto la légitimité de parler au nom du peuple camerounais. C’est le cas d’Eric Tchouleu sur le site Cameroonvoice.com, qui dit : « Très cher monsieur Kamto, […] je m’insurge contre cette duperie à vouloir vous servir du peuple camerounais. […] Vous êtes très mal placé pour croire que vous êtes une alternative. Vous vous dites opposé au projet de société de Paul Biya et […] parlez des armes et de la rue. J’ai un conseil pour votre illustre personne : quand vous aurez décidé d’aller dans la rue mettez vous en tête du cortège, prenez votre femme et vos enfants avec vous, car le peuple auquel vous faites allusion a beaucoup plus d’amertume pour l’opposition que pour le pouvoir. Ceci pour trois raisons que je vais vous énumérer : la première et la fondamentale est le fait d’être incapable de vous rassembler pour montrer à ce peuple que vous avez de l’intérêt pour lui ; la seconde c’est comment assainir le secteur public de ses gangrènes que sont la corruption et le favoritisme ; et la dernière remarque l’incapacité à émerger au de-là de son cercle régional. »En tout état de cause ceux qui, comme Kamto, agitent le spectre de la violence, de l’insurrection, de la brutalité et de la barbarie politique doivent garder à l’esprit que les Camerounais ne peuvent plus se laisser berner par des vendeurs d’illusions. Ils ont assez souffert de cette manière de concevoir et de faire la politique qui, au demeurant, reste un débat d’idées. Ils l’ont d’ailleurs fait savoir, en réservant à Kamto le sort qu’il mérite, malgré son agitation : un député et quelques conseillers municipaux qui, même réunis dans une unité administrative, ne peuvent pas constituer le conseil de la plus petite commune du Cameroun. Et, par-dessus tout, l’Etat camerounais est fort. Parce que ses institutions fonctionnent normalement. Parce que les appareils dont il s’est doté pour assurer la sécurité des personnes et des biens sont là pour défendre le vrai peuple, celui qui a donné 148 députés au Rdpc et permis que le parti de Paul Biya contrôle totalement ou partiellement 305 communes sur les 360 du pays. Tant pis si ce résultat sur lequel le Rdpc ne crache pas enrhume Kamto. Décidemment, ce monsieur n’a pas l’étoffe d’un leader politique. « Politic no be book. »

William Pascal Balla

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