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L'Editorial

MIDA, comme…MIDAS :

C’est l’affaire qui défraie la chronique en ce moment au Cameroun, devant la session de plein droit du Sénat et bien d’autres sujets d’actualité.

L’affaire  MIDA, entendez MISSION D’INTÉGRATION  ET DE DÉVELOPPEMENT POUR L’AFRIQUE, puisqu’il s’agit d’elle, a connu un rebondissement spectaculaire le week-end dernier avec la publication du communiqué du ministre de la communication annonçant la décision du gouvernement de mettre un terme aux activités de cette organisation aux contours et aux objectifs flous. 
 
Depuis le mois de septembre 2017, MIDA proposait aux jeunes Camerounais une formation moyennant une contribution de douze mille francs. Au terme de celle-ci d’une durée d’un mois à peine, chacun recevait un appui financier de 70000 francs pour la réalisation d’un projet. Trop beau pour être vrai? Les pigeons ne se sont pas posé la question et ils y ont laissé des plumes en espèces sonnantes et trébuchantes. N’ont-ils pas subodoré que le flou cachait un loup? Qu’il s’agissait d’un coup fourré, d’une « frappe », même pas chirurgicale, ou encore d’un miroir aux alouettes? Quel est le montant du préjudice? Peu importe! Garant de la paix sociale et au risque d’accorder une prime à l’escroquerie, le gouvernement a décidé de rembourser les victimes. 
 
L’affaire MIDA n’étonnera donc que les naïfs et ne surprendra que les personnes de bon sens. Elle n’est pas la première du genre et certainement pas la dernière. Elle est surtout un symptôme supplémentaire de la cupidité, de la stupidité, de la crédulité et de la tendance à la facilité qui caractérisent aujourd’hui des pans entiers de la société camerounaise à l’ère des réseaux sociaux. L’appât du gain facile est devenu la gangrène de notre société. Pour autant, ce constat n’exonère pas les pouvoirs publics de leur devoir de vigilance et de protection des citoyens en toute circonstance. Jusqu’où iront la tolérance administrative, le laxisme et l’affairisme de certains responsables et agents publics?
 
Quelques réminiscences de culture générale et de connaissances en mythologie grecque auraient pourtant dû mettre la puce aux oreilles des uns et de autres. Dès lors que l’organisation se présentait au public sous le nom de MIDA avec comme feuille de route de distribuer de l’argent facile, les gens auraient dû penser à l’histoire du dirigeant grec MIDAS. Selon la mythologie de l’Antiquite, MIDAS était un roi cupide et stupide qui, après un vœu, reçut le don de transformer tout ce qu’il touchait en or. Fou de bonheur, le roi se jeta sur tous les objets à sa portée qui se transformaient tous en or les uns après les autres, y compris les aliments et les boissons. Résultat: impossible de manger ou de boire. Face à la faim et à la soif qui le tenaillaient et menaçaient sa vie, le roi fut pris de regret et dut se résoudre à abandonner son vœu. Pour perdre son don, on lui conseilla de se baigner dans un fleuve de son royaume dénommé Pactole. MIDA s’y lava entièrement et perdit son don mais même le sable du fleuve avait eu le temps de se transformer en or. D’où l’expression qui a traversé les siècles et les continents pour continuer à être d’actualité aujourd’hui : « toucher le pactole ». 
 
Voilà les références historiques de l’affaire MIDA. Comme MIDAS, le roi grec,  les promoteurs de MIDA ont cru avoir le don de transformer tout ce qu’ils touchent en or. Et comme des illusionnistes, ils ont hypnotisé des milliers de Camerounais simples d’esprit. Tels des pigeons, des mouches devant un bol de vinaigre ou des alouettes à la recherche d’un miroir, les souscripteurs ont donc succombé. Ils croyaient toucher le pactole. Ils ont été plumés, floués, dupés, escroqués. Avant de blâmer le laxisme ou la légèreté de certains responsables publics, l’affaire MIDA est d’abord et surtout la fascination de l’affairisme et de l’argent facile qui s’est emparée des Camerounais. La vigilance, la fermeté et la générosité du gouvernement n’y changeront rien. Tant qu’il y aura des pigeons et des naïfs au sein de la société, il y aura toujours des « feymen » et des phénomènes MIDA, lointain héritier ou simple succédané du roi MIDAS des temps modernes. 

Christophe MIEN ZOK

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