Par ces temps de covid-19 et à l’ère triomphante des réseaux sociaux incontournables, les tonneaux et les coquilles vides occupent plus que jamais l’espace pour produire ce qu’ils savent le mieux faire: du bruit. La communauté des followers et les consommateurs de ces technologies de la communication sont donc servis matin, midi et soir par la fréquence et le volume de la production. Quant à la qualité…on repassera. Ça peut fonctionner comme un orchestre, même si la cacophonie tend souvent à prendre le dessus: le « chef » donne le ton puis les autres suivent. Comme des moutons de Panurge. Pas toujours au même moment et de manière harmonieuse. L’essentiel est que chacun joue sa partition, à temps ou à contretemps; quitte à tirer à hue et à dia. Les sujets et les thèmes ne manquent pas, sauf qu’il est difficile de retenir longtemps l’attention sur des choses importantes. La grivoiserie, la légèreté, la méchanceté, la médisance et la calomnie tiennent le haut du pavé dans ce concerto dont certains ont fait leur principale activité. Inutile de chercher à distinguer le bon grain de l’ivraie. Le critère essentiel d’existence et de performance dans le milieu consiste à faire le maximum de bruit -le fameux buzz- au besoin en recourant à la provocation, à la surenchère, à l’invective voire à la calomnie, au dénigrement et à l’injure.
Il existe donc désormais un marché du bruit, le buzzness, avec ses producteurs, ses consommateurs, ses acteurs, ses stars, ses têtes de turcs. Il sature l’espace, occupe de nombreuses personnes. C’est à qui fera le maximum de bruit, vendra le plus du vent ou adoptera la position la plus iconoclaste. Bien malgré eux, et pour des raisons de survie, les médias traditionnels se transforment en caisses de résonance et ne résistent pas souvent à la tentation de relayer et d’amplifier à leur tour ces bruits sans consistance ni fondement. À force de les entendre du matin jusqu’au soir, certains finissent par gober ces sornettes et se convainquent de leur pseudo-utilité. Et pourtant tout n’est que du vent, de la fumée, de la poudre de perlimpinpin jetée aux yeux des naïfs qui se repaissent de tout ce qui est fugace, éphémère et volatile. Gare aux bruits…d’optique !!!
Dommage que certains hommes politiques, par paresse, opportunisme ou vacuité idéologique, soient de plus en plus nombreux à succomber à ce mirage pour en faire leur unique terrain d’expression et de prédilection. La politique 2.0 avec ses prestidigitateurs, ses illusionnistes et ses charmeurs de serpents remplacera-t-elle la politique à l’ancienne? L’évolution est en cours, mais il faudra un certain temps pour y parvenir.
En attendant, la « politique à l’ancienne » a encore de beaux jours devant elle. On ne pourra quand même pas nous faire croire que le virtuel peut l’emporter sur le réel; l’artificiel sur le naturel; l’éphémère sur le définitif; le fragile sur le solide. Malgré leur talent, les vendeurs d’illusions qui animent les réseaux sociaux ne pourront jamais remplacer les hommes et les femmes politiques de terrain confrontés au quotidien aux difficultés et aux réalités vécues par les populations. Les followers ne pourront jamais voter en lieu et place des électeurs en chair et en os. Qu’ils continuent donc de brasser de l’air. Qui sème le vent récolte la tempête.