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L'Editorial

Promesses non tenues :

“Depuis plus d’une décennie les Etats occidentaux ne parviennent pas à tenir leurs promesses de consacrer seulement 0,7% de leur budget à l’aide publique au développement“

Le Président camerounais Paul Biya est arrivé à New York lundi dernier pour participer, aux côtés d’une centaine de dirigeants du monde entier, à la 65e Assemblée Générale de l’ONU consacrée en grande partie au bilan de la mise en œuvre de la première décennie des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD).

Lancé en 2000 par l’ONU, le programme, décliné en 8 objectifs prioritaires (éradiquer l’extrême pauvreté et la faim, assurer l’éducation primaire pour tous, promouvoir l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes, réduire la mortalité infantile, améliorer la santé maternelle, combattre le SIDA, le paludisme et d’autres maladies, assurer un environnement durable, mettre en place un partenariat mondial pour le développement) présente un bilan plutôt mitigé dix ans après. Acteurs, observateurs et partenaires de ce projet s’accordent à reconnaître que les objectifs sont loin d’être atteints. Les fruits n’ont pas tenu la promesse des fleurs. L’élan de générosité, les attentes et les bonnes intentions se sont brisés sur le roc des réalités, le mur des égoïsmes et les remparts des petits intérêts des pays riches. A cinq ans de l’échéance fixée (2015) pour l’atteinte des OMD, le chemin à parcourir est encore long ; les efforts à fournir nombreux.
Seuls les optimistes indécrottables seront surpris par ces retards et ces lenteurs. En sa qualité de sage et désormais l’un des doyens de la scène politique internationale, Paul Biya, qui a pris la parole hier soir pour la 6e fois consécutive à la tribune des Nations Unies, le regrettait déjà en 2009 dans la même enceinte. Après avoir salué la « forte mobilisation impulsée par les grands pays industrialisés » pour résoudre la crise financière internationale, le Président camerounais constatait avec tact et lucidité mais non sans une pointe d’amertume et de déception. « Il y a là assurément une belle illustration de solidarité, une solidarité internationale telle que vous la voulons, telle que nous aurions aussi voulu la voir se manifester dans la réalisation des objectifs du millénaire pour le développement, dans notre souci commun de réduire le fossé entre le Nord et le Sud, dans les combats que nous menons au quotidien contre la pauvreté, la faim et les pandémies. Je veux dire, en d’autres termes, que si nous avons pu nous mobiliser avec tant d’ardeur pour contenir les effets de la crise financière, nous le pouvons également face à d’autres défis qui nous sont lancés, notamment ceux de la pauvreté et du sous-développement dans lesquels vivent encore tant d’êtres humains à travers le monde. » Propos pleins de sagesse mais dont l’écho tarde à être amplifié.
Que retiendra-t-on finalement de cet énième sommet consacré aux problèmes de développement et de solidarité dans le monde ? Quels résultats et quel impact sur l’éradication des fléaux qui minent une partie de l’humanité ? Les sommets se suivent et passent mais les problèmes demeurent. De Alma Ata au Kazakhstan où fut lancé au début des années 80 le slogan « santé pour tous en l’an 2000 » à Green Eagle en Ecosse où les dirigeants du G8 prirent des engagements fermes pour la réduction de la dette des pays pauvres en passant par Cancun, Davos et autres cités balnéaires ou paradisiaques, les cimetières des illusions des peuples sont ainsi parsemés de nombreuses croix blanches, symboles du fossé sans cesse croissant entre les discours et les actes. Depuis plus d’une décennie les Etats occidentaux ne parviennent pas à tenir leurs promesses de consacrer seulement 0,7% de leur budget à l’aide publique au développement. De nouveaux engagements ont été pris hier à New York comme d’autres l’avaient été à Londres, Paris, ou Berlin. L’objectif santé pour tous en l’an 2000 est resté un slogan. Entre temps, le SIDA est venu s’ajouter au paludisme et à d’autres pandémies. Avec les ravages que l’on sait… A ce rythme, les objectifs du millénaire pour le développement seront encore au stade des utopies en 2015.
A moins que, comme le préconisait le Président Paul Biya, les pays du Sud et du Tiers Monde prennent leurs responsabilités en comptant d’abord sur leurs propres efforts. En cette année du cinquantenaire des indépendances de la plupart des Etats africains, il n’y a pas de défi plus exaltant.

Christophe MIEN ZOK

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