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L'Editorial

Des primaires aux investitures… :

Au fur et à mesure que les jours passent et que les élections législatives et municipales se profilent à l’horizon, le débat enfle et envahit l’espace public. Dans les rangs du Rdpc et au-delà,

la question sur le mode de sélection des candidats du « Parti du flambeau ardent » fait couler encre et salive. Le débat est vif, animé parfois houleux, souvent mal orienté mais il reste toujours intéressant. En attendant l’option et la formule que voudront bien retenir, le moment venu, les instances dirigeantes du Parti, dans l’intérêt supérieur du Rdpc, analysons les points de vue des uns et des autres et tentons d’en dégager quelques clarifications pour un débat sain et serein. Avant de continuer, un postulat s’impose : la démocratie est consubstantielle au fonctionnement et à l’organisation du Rdpc. En d’autres termes, les valeurs et les principes démocratiques sont inscrits dans les gènes du Rdpc. Depuis sa création en 1985, le Rdpc a toujours encouragé et pratiqué le libre choix de ses candidats et de ses dirigeants. Les souvenirs des militants de la première heure résonnent encore des échos des renouvellements « démocratiques et pluralistes » des bureaux des organes de base de 1986 ou de 1996. Personne n’a oublié les « étincelles » issues des opérations de consultations à la base ou les présélections des candidats – plus connues sous le nom de primaires – pour les élections législatives et municipales de 1997, 2002 et 2007. Ces opérations au cours desquelles le Parti est en compétion avec lui-même avec tous les risques que cela comporte et les dérapages observés ont montré à suffisance le côté irréversible de la démocratie interne. Cela est à mettre à l’actif du Rdpc et de ses dirigeants, à la tête desquels le Président national Paul Biya. Les « primaires ou consultations et autres présélections » des candidats à la base ont toutefois montré leurs limites par le passé puisqu’elles ont plus ou moins consacré de grands électeurs (présidents de comités de base, membres des bureaux des organes de base) sensibles à toutes sortes d’influences, en commençant par celle de l’argent. Des personnes peu recommandables et à la moralité parfois douteuse ont ainsi fait intrusion dans le parti, écornant au passage son image et ses valeurs.Qu’à cela ne tienne, fidèle à ses options démocratiques, le Rdpc a, au cours de son dernier congrès ordinaire, décidé d’aller plus loin dans la participation des militants à la vie du parti en élargissant les collèges électoraux. Finie la notion de grands électeurs : dans un organe  donné, les membres du bureau de cet organe (et par extension les candidats du Parti à une élection locale ou nationale) seront désormais élus ou choisis par tous les militants. Si la disposition a été unanimement saluée au lendemain du Congrès, personne n’en a mesuré les contraintes. Dans les conditions actuelles, appliquer cette disposition à la lettre revient, pour le Rdpc, à faire élire deux fois ses candidats au suffrage (presque) universel direct. Il n’est un secret pour personne que dans certaines circonscriptions, le quotient électoral du Rdpc, c’est-à-dire le nombre de militants du Rdpc inscrits est au moins égal au nombre d’électeurs inscrits sur les listes électorales ! Le Rdpc peut-il se le permettre ? La question vaut davantage son pesant d’or lorsqu’on sait que chaque fois que le Parti a organisé le renouvellement des bureaux de ses organes de base avant les « primaires », il s’est exposé à toutes sortes de risques, le moindre n’étant pas la tentation des « battus » et des déçus d’aller miser leurs chances dans d’autres partis.Au demeurant, toutes les options sont permises, chacune – primaires ou investitures – comportant des avantages et des inconvénients certains. Il convient par conséquent d’éviter tout dogmatisme ou tout fanatisme : le libre choix des candidats du Parti par la base n’est pas en contradiction avec la procédure ou le mécanisme d’investiture prévus dans les Textes du Parti. A titre de rappel : l’article 23 des statuts dispose en son alinéa 1 que «  le Comité Central est l’organe chargé d’assurer la direction du Parti » et l’alinéa 5 du même article complète : « le Comité Central accorde les investitures du Parti à l’occasion des élections nationales ou locales ».Les dispositions règlementaires sont encore plus claires et explicites à l’article 58 du Règlement intérieur qui dispose : « 1. Sans préjudice des dispositions de l’article 27 des statuts, le Comité central accorde l’investiture aux différentes consultations électorales. Il peut investir un ou plusieurs candidats du Parti pour un même siège ou présenter une ou plusieurs listes. 2. Toutefois, pour les élections locales, le Comité Central peut sous sa supervision, habiliter les Organes de Base du Rassemblement Démocratique du peuple Camerounais à accorder l’investiture à un ou plusieurs candidats du Parti pour un même siège ou à une ou plusieurs listes. »Que retenir de tous ces éclairages ?1- Le débat actuel est intéressant mais il est biaisé par ceux qui se sont préparés de longues dates à faire main basse ou à lancer une offre publique d’achat (Opa) sur le Parti par la force et le pouvoir de l’argent.2- Les primaires et les investitures sont les deux faces complémentaires, et pas antagonistes, d’une même médaille qui consiste pour le Parti à choisir des candidats « intègres, loyaux, compétents, patriotes… » Dans cet exercice, la base donne un avis dont le Comité Central doit tenir le plus grand compte mais qui peut tout autant être rejeté si des circonstances, critères et autres paramètres d’appréciation l’exigent.3- Dans la plupart des pays dits démocratiques, c’est l’appareil du Parti qui choisit les candidats à travers des instances et des comités d’investitures. Le Rdpc a opté pour des consultations à la base tempérées par les investitures des instances dirigeantes qui constituent des gardes fous et des balises de protection pour certains militants. On l’a vu récemment aux sénatoriales. En tout état de cause, rappelons à ceux qui auraient tendance à l’oublier que dans le Parti de Paul Biya, les primaires, présélections ou consultations s’achèvent toujours par un acte réglementaire dénommé attestation d’investiture. Seul le Comité Central est compétent pour le délivrer. A défaut, il peut, sous sa supervision, habiliter un organe de base du Rdpc – et non de l’Ofrdpc ou de l’Ojrdpc – à le faire.Ces explications et ces arguments, on l’espère, vident le débat de toute sa substance. In fine, les instances dirigeantes du Parti savent ce qu’elles ont à faire. Et la décision qu’elles prendront, en temps opportun, ni trop tôt ni trop tard, le sera dans l’intérêt supérieur du parti ; elle sera conforme aux Textes et aux traditions du Rdpc. Tout le reste n’est que ratiocination.
CMZ

Christophe MIEN ZOK

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